Après le tremblement de terre, de fausses rumeurs attisent la peur des étrangers
Quand la terre qui tremble ébranle même le bon sens. Après le séisme de magnitude 5,3 qui a secoué la région d’Osaka (ouest du Japon) lundi, qui a fait quatre morts, les autorités locales ont mis en garde contre les rumeurs qui ont commencé à circuler sur les réseaux sociaux. Certaines faisant notamment état de crimes – imaginaires – commis par des « étrangers ».
Le Huffington Post Japon rapporte que dix minutes seulement après le séisme, lundi matin, des messages ont commencé à circuler sur Twitter au sujet d’un déraillement de train, d’un zèbre en cavale, ou de l’effondrement de divers bâtiments, des informations qui se sont révélées fausses.
Parmi ces rumeurs, un certain nombre concernaient « les étrangers », qui n’étant « pas habitués aux tremblements de terre », « pillaient des supérettes » ou « se ruaient vers l’aéroport », en net contraste avec « l’attitude calme des Japonais ». D’autres annonçaient de possibles attaques terroristes commises par ces personnes étrangères. Des rumeurs souvent démenties par d’autres internautes, puis par les autorités locales. « Vérifiez la source de l’information et assurez-vous que celle-ci est fiable », avertit un message sur le site du département d’Osaka.
Plus de 6.000 Coréens et Chinois lynchés après le séisme de 1923
Les rumeurs de ce type ne sont pas nouvelles, et ont tendance à refaire surface à chaque catastrophe naturelle. Après le tremblement de terre de Kumamoto (sud du Japon), qui a fait plusieurs dizaines de morts en avril 2016, de fausses informations sur la fuite d’un lion ou l’empoisonnement d’un puits par des Coréens avaient par exemple été partagées des millions de fois. Il y a près de cent ans, lors du tremblement de terre qui a ravagé la région de Tokyo en 1923, de telles rumeurs avaient provoqué le lynchage de plus de 6.000 Coréens et Chinois.
Plus récemment, après la triple catastrophe de mars 2011, plus de 80 % des personnes qui ont répondu à un sondage effectué cinq ans plus tard à Sendai (nord-est du Japon) disent avoir cru aux rumeurs concernant les crimes commis par « les étrangers ». En tête des crimes qui leur étaient imputés, « vols et pillages » arrivaient devant « atteinte à l’intégrité de cadavres » (notamment en leur coupant les doigts pour voler les bagues) et « agressions et viols ». Interrogés sur la nationalité des prétendus criminels, les sondés plaçaient en tête les « Chinois », devant les « Coréens », et « des personnes d’Asie du Sud-Est ».
« C’était sans doute pratique d’avoir ces rumeurs qui attribuaient les crimes aux étrangers, pour ne pas contredire l’image des Japonais qui gardaient leur flegme », analysait pour le journal Mainichi Kwak Kihwan, professeur à l’Université Tohoku gakuin à Sendai, à l’origine du sondage. « Il y a aussi probablement des gens qui contribuaient à répandre ces rumeurs, pas pour nuire, mais parce qu’ils étaient inquiets. » Ces rumeurs « refont surface lors des séismes majeurs, et il n’est pas simple de les éliminer, constate le chercheur. Il faudrait que chaque personne ait la capacité de les analyser. »
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